vendredi 24 juillet 2015

"Qui a peur de l'obésité ?" 1er épisode : Le commerce des régimes par Catherine Grangeard

Ce texte est le premier volet d'une série consacrée à l'obésité. 

Il a été écrit par Catherine Grangeard, psychanalyste qui s'intéresse depuis longtemps à la question.
(Elle précise "d'où elle parle" après l'article, dans les commentaires. )

Le volet 2, rédigé par Marc Zaffran/Martin Winckler, sera consacré à la maltraitance des personnes en surpoids. 

Nous espérons que ces textes susciteront réactions, commentaires et - pourquoi pas ? - de nouvelles contributions. 

MW 
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The Journal of the American Medical Association (JAMA) publie le 2/01/2013 l’analyse des données d’une analyse d’une centaine d’études regroupant 2,88 millions de personnes. C’est du lourd, du sérieux. Conclusion : un surpoids modéré peut favoriser la longévité. 

L’examen du risque de décès, quelle que soit la cause met en évidence une réduction de 6% pour les personnes en surpoids (IMC entre 25 et 30) par rapport à celles à IMC dit normal (18,5 à 25).

Katherine Flegal montre aussi qu’une réduction de 5% demeure pour celles qui ont un IMC de 30 à 35, qui sont donc en obésité modérée par rapport aux personnes en IMC normal…

L’obésité massive est accompagnée de comorbidités, statistiquement il y a surmortalité. Maispas le surpoids…

Notre surprise ne s’arrête pas là. Les conclusions de cette étude portant sur près de 3 millions de personnes (excusez du peu !), financée sur des fonds publics avec des auteurs qui ne déclarent aucun conflits d’intérêts, eh bien, ces conclusions ne sont pas inédites… elles sont cohérentes avec 2 études précédentes (2005, 2007).

Mais, alors direz-vous ? 10 ans après on croit pourtant lire un scoop.
Cherchez l’erreur…
OK, cherchons ensemble.

A qui profite le crime ? Les enquêteurs posent cette question pour démarrer.
Pas aux personnes qui s’escriment à perdre des kilos qu’elles estiment en trop pour atteindre l’IMC dit normal. Ça leur coûte, à tous niveaux.

Humainement, que d’efforts pour se contraindre à un autre poids que celui vers lequel elles tendraient naturellement mais qui a été décrété comme trop important. Par qui, pourquoi… On croyait que c’était pour être en pleine forme et vivre longtemps. Mais, non… Katherine Flegal montre, 2,88 millions de personnes à l’appui, qu’il n’en est rien.

Mais que fait la police ? (pardon, les médecins). Pourquoi se serre-t-on la ceinture ? Ou plus exactement pourquoi introduire dans les esprits cette conviction qu’hors la minceur, pas de salut ?

Cette méga-analyse est bien peu diffusée alors que tant de médecins-stars occupent les écrans. Pourquoi cet assourdissant silence ?

Le Professeur Patrick Tounian avançait une hypothèse sur « la ribambelle de réactions négatives, notamment de ceux qui vivent de l’obésité et ont intérêt à ce que leur gagne-pain ne soit pas relativisé et soit considéré comme un terrible fléau ».

Qu’en dit Hippocrate ? Il se retourne dans sa tombe une fois encore.

Examinons alors la fabrication de l’obésité.
Présentée comme un fléau, la peur du siècle, un conditionnement façonne les populations. Si quelques kilos s'installent, il s’agit de les faire disparaître.

Se surveiller… et s’empêcher.

Les sociétés occidentales vivent dans l’abondance de nourriture, les publicités invitent à consommer en permanence, au- dessus de ses moyens… Mais les modèles qui sont utilisés, les top models, n’ont sans doute pas ce mode de vie. Leurs corps sont minces, très, très minces même.

Ces injonctions paradoxales sont sources de stress. Le stress appelle les compensations. Au secours !

Heureusement, le système est si bien fait… Les régimes fleurissent de partout. Coaching, est leur nouvelle dénomination.

En novembre 2010, le rapport de l’ANSES accable tous les régimes, quels qu’ils soient, et il prouve leur inutilité. Et leur nocivité. A 5 ans, 95% sont des échecs. Tous les kilos perdus ont été repris, avec un bonus plus ou moins légers selon les personnes.

Pratiquer le yoyo mène à l’obésité !

Plutôt que mettre en corrélation les résultats de ce rapport et la méga-analyse, sur près de 3 millions de personnes, le marché minceur a pratiqué la politique de l’édredon. Etouffer ce qui pourrait sonner l’arrêt du jeu.

Car tout cela rapporte gros… Près de 4 milliards d’euros en France, par an !
Le titre « Les marchés de la minceur, horizon 2016. Vers un écosystème numérique et interconnecté »  (étude vendue plus de 2000 euros pour une version papier et atteignant 5000 euros si la diffusion se fait au sein de votre entreprise…par Precepta, groupe Xerfi) indique la tendance…

Voyons donc les sites minceur, puisque c’est de ce côté que se situe l’horizon.
Centrons même notre viseur sur les sites des médecins. Sont-ils encore médecins ou uniquement commerçants ?

Un article tout neuf (Capital, 17 juillet 2015) est fascinant ! Sur fond d’embrouilles entre (je cite toujours) Dukan, le roi du régime et Simoncini, le pape de la rencontre sur Internet (ancien patron de Meetic). En 2007, ils s’associent pour créer Régime coach, société de coaching minceur comme son nom l’indique clairement, régime et coaching c’est du pareil au même… Succès fulgurant, 18 millions de CA en 2010. Ensuite, l’embrouille, mais ça ne nous intéresse pas vraiment ici. Comme dans tout polar qui se respecte, l’intrigue est tordue. Diet Mafia blues…

Si cette histoire est ici relatée, c’est pour d’autres raisons. Déjà, fournir un ordre d’idées du rapport financier. Et, le célèbre ex-docteur Dukan n’est pas le seul à vendre du coaching minceur en ligne. Le Docteur a fait des petits…
Le massacre est de masse, alors ça se complique…

Soit on demande au Conseil de l’Ordre de jeter un œil vers l’horizon et de faire respecter un peu d’Ordre. Soit, on ne s’intéresse pas seulement aux cas individuels des Dr A, C, … Z… et on se tourne vers le Ministère de tutelle, le Ministère de la Santé. (Pourquoi, « soit », l’un exclut l’autre ?)
Une expertise s’imposerait peut-être …
Pire que la canicule, cette affaire !

La sécurité routière fait diminuer les morts sur la route en limitant la vitesse, en contrôlant l’alcool au volant… et que sais-je, en distribuant les bons points du permis, en faisant appliquer le Code de la route.
Pourquoi pas un Code des sites minceur ?
Ah, parce que ça n’existe pas ?
Ben, non. Rien.

Vous vous frottez les yeux ? D’autres, c’est les mains… les petits malins. Oui, les 29 euros mensuels que vous coûtent ces formules, ces petits programmes rebaptisés coaching… ça se chiffre en millions d’euros au final !

Tout cela parce que la peur de grossir a été vendue comme la peur du siècle !
C’est comique. C’est tragique.
Oui, pourquoi acheter la poudre de perlimpinpin ou les formules A… C… Z ?
La peur de ne pas être aimé-e.

Parce que c’est la peur de l’humanité. Rappel : tout bébé arrive sur terre incapable de se débrouiller tout seul. Il est dépendant du bon vouloir de l’autre pour le nourrir, le tenir propre, à la bonne température, le protéger, lui permettre de se reposer, lui assurer son bien- être, sa sérénité, sa sécurité, etc… TOUT.

La dépendance a cette origine.
La peur de ne pas être aimé, d’être maltraité, abandonné, … est enracinée dans cette réalité humaine d’arriver sur terre en ayant besoin de l’autre pour survivre.
Ainsi, créer une adéquation entre cette peur ontologique et le fait que pour être désirable, il faut avoir tel corps, est ……….. grave.

Ce n’est peut-être pas un total hasard que les médecins se doivent d’avoir une certaine éthique, une éthique certaine. Science sans conscience, etc…
Faire du commerce est-ce préjudiciable ?
En soi, certes non.
La confusion des genres en revanche, oui.

Notre enquête avance à grand pas finalement.
Les sites minceur prospèrent dans un vide juridique total. C’est impensable alors que l’horizon est indiqué de ce côté. Visiblement à juste titre, vu le CA indiqué par la revue Capital.

La casse du côté des gens qui s’adonnent à ces coachings est catastrophique.
Pour le moment, l’auto évaluation des sites par eux-mêmes n’a aucune fiabilité. Pour le moment, une personne se rendant une fois sur le site, sans même s’inscrire à un programme se voit relancée et pas n’importe quand… A des dates clés, Noël, début janvier pour les bonnes résolutions de l’année nouvelle, à la St Valentin, à la fête des mères, début juillet pour aller à la plage… Un certain Joseph en a fait l’expérience. Le site s’adressait même à lui au féminin, tant le formatage est fort.

Le journaliste Patrick Wassef montre bien le lien entre le sexisme souterrain et le commerce de ces médecins sur leurs sites minceur. 

« Il faut souffrir pour être belle »… Il faut être belle !?? Cette oppression est l’envers de l’obsession de minceur comme ces féministes le montrent (https://www.infokiosques.net/IMG/pdf/Oppression_Et_Liberation_De_La_Grosseur.pdf

Conclusion : les femmes doivent se soucier de leur ligne.

Le professeur Tounian avait bien touché du doigt le gagne-pain mais il s’arrêtait au seuil des raisons profondes, tout au moins en ce qui concerne les femmes, public visiblement privilégié puisque Joseph est féminisé par le site de coaching en ligne

Un autre site http://duketik.blogspot.fr nous apprend beaucoup de choses sur le fonctionnement en interne d’un site minceur. La formation des chargés de clientèle serait un point à mettre en lumière par l’expertise. Puisque le prétexte de certains médecins est qu’il leur est impossible de répondre à la demande (sic) en consultations, les sites y répondent… mais les imagine-t on derrière chaque écran prenant Joseph en charge ? 

En France, le PNNS actuel s’achève en 2015. Très bonne occasion pour que le prochain mette sous son égide ce travail d’enquête.

La nôtre, d’enquête, arrive à son terme… la diffusion de la bonne nouvelle en ce qui concerne le surpoids n’a pas besoin d’attendre plus longtemps… Inutile de se faire maigrir, et souffrir, en engraissant les sites minceur, enfin, ceux qui en profitent. Et sortons de l’édredon certains scandales !

Pour le bien de tous, partagez au plus vite…

Catherine Grangeard






lundi 20 juillet 2015

Est-il acceptable qu'un.e gynécologue exige de ses patientes qu'elles fournissent un spéculum avant de prendre rendez-vous ?



Une patiente prend rendez-vous avec une gynécologue via le site internet de celle-ci.
En soi, la démarche peut surprendre, mais pourquoi pas ? Toute méthode qui peut faciliter les contacts entre patients et médecins est bonne si elle apporte un avantage, et il est vrai que pouvoir prendre un rendez-vous rapidement, sans avoir besoin d’attendre les heures de présence du praticien, sans non plus passer un long moment au téléphone, et sans avoir besoin de livrer à un tiers (le/la secrétaire) des éléments confidentiels, c’est en soi un progrès.
Cependant au moment où elle utilise le site (celui d’une gynécologue de la région toulousaine), la patiente se retrouve face au message suivant :



"Bonjour
Merci d'acheter votre spéculum en pharmacie avant votre rendez-vous. 
Merci." 

Ce message me suggère plusieurs remarques  – techniques, symboliques, éthiques et déontologiques mais aussi légales. Je vais les évoquer ici.

Remarques techniques :

Rappelons d’abord qu’un spéculum, qui permet d’examiner l’intérieur du vagin et le col de l’utérus est l’instrument premier de l’examen gynécologique visuel. Même si l’examen gynécologique ne doit pas être systématique, tout médecin susceptible de pratiquer cet examen, ou des gestes aussi simples et élémentaires qu’un prélèvement ou un frottis de dépistage cervico-vaginal doit disposer d’un spéculum.





Les spéculums métalliques d’autrefois ont été peu à peu, pour des raisons diverses, remplacées par des spéculums jetables en plastique comme celui dont l'image est représentée ci-dessus. Les professionnels les achètent par lots de plusieurs dizaines. Il n’est pas pensable qu’un.e gynécologue n’en ait pas dans son cabinet. L’achat de spéculums, comme de draps d’examen ou de papier à ECG (pour le cardio) ou encore d’aiguilles et de seringues (pour l’infirmière ou le médecin rhumatologue), fait partie des frais professionnels, au même titre que l’électricité ou le chauffage. 

Demander aux femmes d’acheter «  leur » spéculum, c’est purement et simplement demander aux patients de payer les frais professionnels du médecin – ça équivaut à leur demander d’apporter des aiguilles pour les prélèvements sanguins ou les infiltrations, du liquide de contact pour l’échographie, des gants et des compresses pour soigner une plaie, ou un drap en papier pour le lit d'examen. Aucune contrainte matérielle ou technique ne peut le justifier. Aucune contrainte économique ne peut le justifier non plus. 


Et ce, d’autant moins que, comme je l’ai rappelé au début de ce texte, l’examen gynécologique n’a pas lieu d’être systématique. Si patient.e et médecin pensent qu’il est souhaitable, c’est au médecin de disposer du matériel nécessaire à un examen (tout médecin a une obligation de moyens).  Si le médecin pense que l’examen n’est pas utile, ou si le/la patient.e le refuse, pourquoi lui demander d’acheter l’instrument avant la consultation ? 


Demander l’achat d’un spéculum, c’est présumer que tout examen gynécologique justifie l’emploi du spéculum, ce qui est faux et abusif. C’est donc faire assumer à la patient.e un coût inutile et injustifié.


Remarques symboliques :

Pour un gynécologue, le spéculum « représente » sa spécialité, tout comme l’otoscope « représente »  l’ORL, le marteau à réflexes la neurologie, l’appareil à ECG la cardiologie et le stéthoscope le médecin ou l'infirmier(e) en général. Ne pas avoir de spéculums pour examiner les patientes alors qu’on est gynécologue n’est pas seulement une lacune, c’est une faute professionnelle.

Bien sûr, le professionnel ne se résume pas à ses instruments, mais je ne connais pas de mécanicien, de cuisinier, d’électricien qui n’ait pas ses propres outils et qui demande que ses clients les lui fournissent pour travailler. « Un mauvais ouvrier a toujours de mauvais outils », dit le vieux dicton. On pourrait ajouter : « Mais le pire des ouvriers n’a pas d’outils du tout. »

Je ne sais pas comment qualifier cette attitude d’un point de vue symbolique. Le seul mot qui me vienne est qu’elle est indigne et irrespectueuse, tant à l’égard des patientes que des professionnel.les qui n'imposent rien de tel. 


Demander, pour tout préalable à une consultation, au patient de fournir un instrument que le médecin doit avoir, c’est contraire à l’éthique pour une flopée de raisons parmi lesquelles :

- c’est contraire au principe de bienfaisance qui veut qu’on délivre les meilleurs soins possible (si vous n’apportez pas le spéculum, vous n’aurez pas les meilleurs soins : on ne vous examinera pas même si c’est justifié) ; 

- c’est contraire au principe de non-malfaisance, par le coût supplémentaire que ça impose dans une société où les soins sont censés être pris en charge par la collectivité mais aussi (puisque le médecin peut ne pas avoir besoin de s’en servir) cela équivaut à racketter le patient en le contraignant à financer le matériel du médecin, lequel fait l'objet de déductions fiscales ; 

- c’est contraire à l’autonomie du patient dans le sens où ça établit une condition à la bonne délivrance du diagnostic et des soins (pas de spéculum, pas de consultation) ; la patiente qui lit ceci peut penser que l'achat du spéculum est indispensable au bon déroulement de la consultation ( sans spéculum, on vous engueulera ou on vous examinera de mauvaise humeur). C'est une forme de pression incompatible avec la délivrance des soins ; 

- c’est contraire à l’équité et à la justice : les patients qui n’ont pas d’argent sont pénalisés au profit de ceux qui en ont.

Bref, sur le plan éthique, c’est du zéro pointé.

Remarques déontologiques et légales :

Le code de déontologie français, inclus dans le code de santé publique (code juridique dont les infractions sont passibles de poursuites au pénal) stipule clairement, entre autres : 

1. Devoirs des médecins
Article 6. Le médecin doit respecter le droit que possède toute personne de choisir librement son médecin. Il doit lui faciliter l'exercice de ce droit.

Si je dois choisir entre un gynéco qui m’impose d’acheter un spéculum et un autre, mon choix n’est pas libre : il est conditionné par le coût supplémentaire. C'est une manière de "sélectionner" les patients en fonction de leurs revenus et/ou de leur docilité (et de leur ignorance des textes réglementaires). C'est donc de la discrimination. Et une forme d'exercice commercial. Or, 

Article 19 (article R.4127-19 du CSP)
La médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce. Sont interdits tous procédés directs ou indirects de publicité et notamment tout aménagement ou signalisation donnant aux locaux une apparence commerciale. 


Article 23 (article R.4127-23 du CSP)
Tout compérage entre médecins, entre médecins et pharmaciens, auxiliaires médicaux ou toutes autres personnes physiques ou morales est interdit.

Toute proportion gardée, imposer l’achat d’un spéculum à la pharmacie du coin ou à la société qui commercialise les spéculums, c’est une forme de compérage (ou de rabattage), puisque ça équivaut à augmenter de manière abusive les revenus du pharmacien au moyen d’une contrainte (exercée par le médecin) qui n’est justifiée ni sur le plan éthique, ni d’un point de vue médical. 

Article 24 (article R.4127-24 du CSP)
Sont interdits au médecin :
- tout acte de nature à procurer au patient un avantage matériel injustifié ou illicite ;
- toute ristourne en argent ou en nature, toute commission à quelque personne que ce soit ;
- la sollicitation ou l’acceptation d’un avantage en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, pour une prescription ou un acte médical quelconque.

Cet article, par son troisième alinéa, indique clairement le caractère illégal de la demande de spéculum ; il s'agit ici d'une sollicitation (par écrit !!!) d’un avantage en nature (le spéculum) pour un acte médical (la consultation). 

A lui seul, il justifie une plainte au tribunal de police, car il s’agit d’une infraction manifeste à  la loi. (N’oublions pas que le CSP, Code de la santé publique, est un texte réglementaire qui a force de loi.)

2. Infractions aux obligations envers les patients

Article 47 (article R.4127-47 du CSP)
Quelles que soient les circonstances, la continuité des soins aux malades doit être assurée.

 Si le médecin impose des conditions à la délivrance des soins, cet article est violé. C’est le cas ici.

Article 53 (article R.4127-53 du CSP)
Les honoraires du médecin doivent être déterminés avec tact et mesure, en tenant compte de la réglementation en vigueur, des actes dispensés ou de circonstances particulières.

Ils ne peuvent être réclamés qu’à l’occasion d’actes réellement effectués même s’ils relèvent de la télémédecine. (voir plus haut la remarque sur l'examen gynécologique non indispensable)

(...) 

Aucun mode particulier de règlement ne peut être imposé aux malades.

Imposer la fourniture d’un instrument, c’est une forme d’avantage en nature (donc, un complément de paiement) de la consultation. C’est illégal.

Conclusion :

Un.e gynécologue qui demande au patient de lui fournir un spéculum avant tout RV n’agit pas seulement de manière non-professionnelle, contraire à l’éthique et symboliquement douteuse, il ou elle est dans l’illégalité la plus complète. Si vous vous trouvez face à ce type d'exigence vous êtes en droit (et, à mon avis, vous avez l'obligation morale) de signaler son caractère inacceptable au praticien en question par écrit et l’inviter à supprimer cette condition au rendez-vous. S’il ou elle persiste dans son attitude, vous êtes en droit de porter plainte (c’est gratuit) devant le tribunal de police, en invoquant les articles 24, 47 et 53 du Code de la Santé publique ; n'oubliez pas d' envoyer copie de la plainte au conseil de l’ordre départemental, au syndicat national des gynécologues obstétriciens et, surtout, à la CPAM de votre domicile et pourquoi pas à l'association des consommateurs et à la direction de la concurrence... 

Laisser faire, c'est être complice. 
A l'inverse, rappeler aux professionnels indélicats leurs obligations, c'est tout à la fois rendre hommage aux professionnels consciencieux et permettre à tous les patients de se faire soigner de manière équitable.


Dr Marc Zaffran/Martin Winckler 


PS au sujet des "kits" de retrait de DIU ou d'implants parfois prescrits aux patientes qui en portent : 

Les professsionnels ont une obligation de moyens. Ils sont tenus d'avoir à leur disposition les instruments nécessaires à leur pratique quotidienne. 

Que faut-il pour retirer un DIU ? Une pince longuette en métal, une compresse et du désinfectant, point final.(La pince a juste besoin d'être lavée et désinfectée. Rappelons que les utilisatrices de DIU peuvent retirer le leur en tirant sur le fil, après s'être lavé les mains, avec deux doigts si elles le désirent...) 

Pour retirer un implant contraceptif : une aiguille, une seringue, de la xylocaïne (anesthésique local), une lame de scalpel (tout le monde peut s'acheter un manche pour mettre des lames à usage unique), une pince, des compresses et du désinfectant. 

Dans un cas comme dans l'autre, tout professionnel du soin amené à pratiquer un examen gynécologique a ça dans ses tiroirs. J'avais tout ça dans mon cabinet de médecine générale ; un gynécologue et une sage-femme ont tout ça également. C'est du matériel d'usage courant. Ca rentre dans les frais professionnels. Ca ne devrait pas non plus, à mon avis, être demandé aux patientes, qui pour certaines n'ont pas les moyens de les acheter (alors que le DIU, l'implant et leur pose sont pris en charge). 

Je sais que les temps sont durs, mais ils sont durs pour tout le monde, et ce n'est pas aux patients d'assurer le renouvellement du matériel professionnel, à mon humble avis.